Dimanche après-midi dans mes stories instagram….
Je partageais avec toi ma progression dans la construction du château fort Playmobil, et mon désespoir face au mini muffin de Sylvanian Families qui s’était glissé dans un trou d’une des tours.
J’ai lâché l’affaire, il y est toujours.
Marin attendait ce cadeau depuis des semaines.
C’était son anniversaire anticipé ce week-end (le vrai a lieu demain 5 juin), et il avait commandé à mes parents la citadelle des chevaliers de l’Aigle, pour héberger la belle collection de chevaliers qu’il avait déjà. En vrai, on était tous très impatients de découvrir ce château….et depuis qu’il est monté Lou et Marin passent leur vie à jouer avec.
Tout le monde est invité : Sylvanians, Petit Poney, Batman, Buzz l’Eclair…c’est la fiesta permanente au château.
Cette story rigolote sur l’histoire du muffin coincé a donné lieu par la suite à une discussion sur instagram avec Sofia. Elle m’a écrit pour me dire qu’elle se sentait rassurée quelque part de voir qu’elle n’était pas la seule à avoir un enfant qui aimait jouer à la guerre.
Elle m’a dit aussi qu’elle ne savait pas comment se positionner par rapport ça, car ce n’était pas les valeurs qu’elle souhaitait lui transmettre et que c’était donc difficile pour elle de ne pas le limiter dans les jeux du genre, ou de ne pas interdire certains mots en rapport avec cette forme de violence.
Alors pour moi, le château fort Playmobil n’est pas un jeu de guerre mais un jeu d’imagination : il suffit d’écouter mes enfants y jouer, ils se placent plutôt sur le plan du chevalier valeureux qui sauve les animaux, avec une bonne dose d’anachronisme aussi (comme quand le chevalier blanc s’en va en soucoupe volante – une assiette de la dînette – pour aller acheter un téléphone ^^).
En revanche, oui c’est vrai, de façon générale Marin aime les jeux de guerre et jusqu’à il y a peu, j’avais bien du mal à choisir quelle attitude adopter par rapport à ça. J’ai donc envie aujourd’hui de vous raconter mon cheminement de parent sur ce sujet.
Quand mes enfants étaient petits, je filtrais tout ce qui ressemblait de près ou de loin à un pistolet.
Il m’arrivait même de poser des consignes claires à l’entourage : pas d’armes dans les cadeaux. J’avais même du mal l’été avec les pistolets à eau…ils ont beau être inoffensifs, la forme de l’objet me rappelle sans cesse que dans la vraie vie, chaque seconde, des humains et notamment des enfants meurent à cause d’objets de cette forme là. Et globalement j’ai toujours eu du mal avec le fait de « jouer » avec ces objets là.
Mais le filtrage, bien sûr, ne sert à rien.
Tout simplement parce que mon fils a accès à cela en dehors de la maison, et donc, hormis réduire le nombre de contacts avec ces objets et ces jeux, ça ne les fait pas disparaître pour autant.
Il a donc vécu sa vie d’enfant et construit son rapport personnel à ces objets. Et oui, effectivement, il aime vraiment jouer avec. Pistolets et fusils à fléchettes ventouses sont de loin ses jouets préférés. Mes fenêtres le savent bien ! Il aime aussi les arcs, les couteaux, les épées, les armures.
Dans mon for intérieur de maman, j’aurais envie de tout enlever, d’interdire même, parce que ce ne sont pas les valeurs que j’aimerais qu’il intègre.
Mais j’ai fini par accepter…
Comme souvent quand je me vois en train de vouloir diriger ou contrôler ce que font mes enfants, quand je me vois établir ce qu’ils auraient le droit de faire ou pas, d’aimer ou non pour correspondre à mes valeurs ou à l’idée que je me fais d’un citoyen, je me rappelle que leur vie n’est pas la mienne.
Je me mets dans leur situation : si quelqu’un décidait que parce que ça ne correspond pas à ses valeurs, je n’avais pas le droit de m’habiller comme je le veux ? Ou faire les activités qui me plaisent ? Ou de lire des romans policiers (souvent très violents d’ailleurs) ? Ou de regarder une saison entière de ma série préférée sans interruption ? Ou de danser à moitié nue sur un podium de boîte de nuit (je ne le fais pas ^^ Mais si c’était le cas ? )
La seule chose que je retiendrais de cela, c’est qu’on empiète sur ma liberté d’être qui je veux, avec les passions que je veux, les intérêts que je veux.
La domination adulte qui ronge les rapports éducatifs depuis des siècles considère que parce que les enfants sont des enfants, c’est aux parents de décider ce qui est bon pour eux. Dans une certaine mesure oui sans doute, sur la santé, ou la sécurité pourquoi pas (encore que sur beaucoup de points, je pense qu’il y aurait matière à débat).
Pourtant nos enfants ont leur vie, à eux, que ça nous plaise ou pas.
Comme nous avons la nôtre, que ça plaise ou pas à notre entourage.
Que nos enfants aient 2 , 5 ou 10 ans ne nous donne pas le droit de décider de ce qu’ils peuvent aimer ou pas, de ce qu’ils doivent manger ou pas.
L’idée ici est d’accepter que nos enfants sont différents de nous, et que parfois ils auront des tendances, des affinités ou des obsessions qui ne nous plairont pas du tout, à tous les âges de leur vie. Mais c’est leur liberté, c’est leur vie, ça leur appartient en totalité et nous n’avons aucun droit là dessus. Hormis celui d’accepter qu’ils ne soient pas comme nous et qu’ils ne nous rejoignent pas (encore ?) sur certaines des valeurs que nous défendons.
Au fur et à mesure que ma réflexion se poursuit sur ces sujets, je suis de plus en plus intriguée par cette limite d’âge où d’un coup, on se met à laisser faire des choses qu’on ne laissait pas faire plus jeune. Assez clairement, cette limite d’âge est mouvante et dépend, souvent, de la capacité de l’enfant à défendre (enfin) ses droits par lui-même.
Non pas parce qu’il est plus mûr, mais parce qu’il est plus fort…
Si on prend l’exemple des armes, ça pourrait être d’interdire les pistolets quand nos enfants sont jeunes pour finalement les laisser faire du paint ball quand ils sont ados.
Pourquoi d’un coup ce serait ok d’avoir une arme de loisirs dans les mains, et avant non ?
Je crois vraiment que c’est parce qu’on a appris que le jeune âge des enfants nous donnait le droit de les modeler comme on voulait.
D’interdire à loisirs en espérant qu’ils deviendraient comme nous, ou comme ce qu’on voudrait qu’ils soient.
Leur croissance nous impose ensuite, physiquement, l’incapacité de continuer à le faire sous peine de faire naître la riposte…peut-être une piste à creuser dans les crises d’adolescence violentes ? L’ado en révolte ne pourrait-il pas être en train d’envoyer un message qui dirait « laisse moi exister pour ce que je suis ? ».
Mon fils aime jouer à la guerre, et c’est sa liberté, sur laquelle j’ai cessé de vouloir intervenir. Je nous fais confiance pour savoir discuter de ces choses de la vie, pour lui donner des éléments de réflexion sur tout ça. Mais ensuite il fera ses choix. Librement. Et si les armes continuent de faire partie de sa vie même bien après l’enfance et bien…ce sera ainsi.
Ce sera lui, et en tant que mère, j’accepterai ça.
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